L’alimentation désormais en bonne place dans l’agenda climatique

COP 28

Cette déclaration de la présidence de la COP sur l’agriculture, les systèmes alimentaires résilients et l’action climatique a été approuvée par 134 dirigeants mondiaux le 1er décembre 2023. Ils se sont engagés à inclure pour la première fois l’alimentation et l’agriculture dans les plans nationaux de lutte contre le changement climatique et à augmenter les financements.

Pendant longtemps, l’alimentation a été une question secondaire lors de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP).  La Déclaration des Émirats Arabes Unis sur l’agriculture durable, les systèmes alimentaires résilients et l’action climatique COP28 indique clairement que l’alimentation figure désormais en bonne place dans l’agenda climatique, ce qui est essentiel car elle représente un tiers des émissions mondiales et est très vulnérable aux effets du climat. « Nous soulignons que toute voie permettant d’atteindre pleinement les objectifs à long terme de l’Accord de Paris doit inclure l’agriculture et les systèmes alimentaires. Nous affirmons que l’agriculture et les systèmes alimentaires doivent s’adapter et se transformer de toute urgence afin de répondre aux impératifs du changement climatique », ont-ils soutenu dans la Déclaration. Cependant, la rhétorique devra être transformée en réalité avec des actions, des objectifs, des calendriers et des financements clairs pour les systèmes alimentaires dans les nouveaux plans climatiques nationaux avant la COP30. Pour Wanjira Maithai, directeur général pour l’Afrique et les partenariats mondiaux au World Resources Institute, la déclaration des Émirats représente un changement de mentalité majeur. « Le système alimentaire mondial, qui représente un tiers des émissions et qui est très vulnérable aux effets du climat, est désormais inscrit à l’ordre du jour et le compte à rebours a commencé».

A son avis, «Les gouvernements doivent immédiatement inclure l’alimentation et l’agriculture dans leurs plans nationaux de lutte contre le changement climatique, ce qui implique des actions concrètes, des objectifs, des calendriers et des financements pour éliminer les combustibles fossiles de notre système alimentaire, promouvoir une agriculture plus diversifiée et plus respectueuse de la nature, soutenir les petits producteurs et réduire les émissions de méthane », a-t-elle déclaré. De son côté, Elizabeth Nsimadala, présidente de la Fédération des agriculteurs d’Afrique de l’Est, qui représente 25 millions de petits producteurs, pense qu’il s’agit là d’un coup d’envoi de la transformation de notre système alimentaire. « Elle –la déclaration- reconnaît que les 439 millions de petits exploitants familiaux du monde entier sont essentiels pour réaliser les changements nécessaires », commente-t-elle. Toutefois, « Pour que nous puissions jouer notre rôle, nous devons avoir notre mot à dire dans les décisions relatives à l’alimentation et au climat et bénéficier d’un accès plus direct au financement climatique : nous produisons un tiers des denrées alimentaires dans le monde, mais ne recevons que 0,3 % du financement international en faveur du climat.  Si les gouvernements travaillent avec nous – et investissent en nous – nous pouvons contribuer à créer les systèmes alimentaires résilients et durables nécessaires pour nourrir le monde pour les générations à venir ».

Aller au-delà des beaux discours

Elizabeth prononcera un discours sur la déclaration des systèmes alimentaires lors de l’ouverture officielle du sommet des dirigeants mondiaux. L’analyse des réseaux représentant plus de 35 millions d’agriculteurs familiaux révèle que les petits producteurs ne reçoivent que 0,3 % du financement public international pour le climat. Ancien rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l’alimentation et membre du comité directeur du groupe d’experts de haut niveau sur la sécurité alimentaire et la nutrition, Hilal Elver, observe que : « Il est grand temps que la conférence des parties les mette au menu principal. L’alimentation et l’agriculture doivent être au cœur des nouveaux plans climatiques et des financements si nous voulons respecter l’accord de Paris et avoir suffisamment d’aliments nutritifs pour tout le monde ». En effet, argumente Hilal Elver, « la destruction de la nature et le changement climatique menacent la sécurité alimentaire, les moyens de subsistance des populations rurales et la nutrition, mais nos systèmes alimentaires sont également à l’origine d’un tiers des émissions mondiales et constituent l’un des principaux facteurs de disparition de la faune et de la flore sauvages ».

S’il est vrai que cette Déclaration est une étape importante sur la voie d’un système alimentaire plus résilient et plus durable, Esther Penunia, secrétaire générale de l’Association des agriculteurs asiatiques pour le développement durable, une alliance régionale d’organisations nationales d’agriculteurs représentant 13 millions d’agriculteurs familiaux, estime que « le véritable travail commence maintenant. Les gouvernements doivent travailler avec les réseaux d’agriculteurs familiaux pour s’assurer que les promesses faites à Dubaï se traduisent par des politiques et des financements concrets afin de soutenir les petits producteurs – qui produisent un tiers de la nourriture mondiale – et de promouvoir une agriculture plus diversifiée et plus respectueuse de la nature, ce qui, selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, est nécessaire pour préserver la sécurité alimentaire ».

Nadège Christelle BOWA

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