L’Open Timber Portal séduit les communes et entreprises forestières

Légalité dans le secteur forêt-bois

Cette plateforme web indépendante interactive conçu par le World ressources Institute (WRI), leur donne une visibilité inespérée dans la quête d’une clientèle de plus en plus sélective sur le marché international du bois légal.

En 2010, le gouvernement du Cameroun signe un accord de partenariat volontaire (APV) avec l’Union Européenne (UE). Le but est d’améliorer la gouvernance forestière, promouvoir la transparence dans le secteur forestier et améliorer la compétitivité du bois en provenance du Cameroun sur le marché international. Dans cet accord, la transparence dans la chaîne d’approvisionnement du bois est considérée comme un aspect important. L’annexe 7 de l’accord détaille les informations à rendre publique. Cette responsabilité incombe à l’administration et à l’UE. Bien qu’il n’y soit pas mentionné, le secteur privé en sa qualité d’acteur important a un rôle primordial dans la publication des informations obligatoires. En effet, renseigne Dr Fridolin Choula, chargé des affaires à Connect Green Industry Solutions Sarl (CGIS), à la demande de ses clients, celui-ci est amené à publier des informations relatives à ses activités.

Pour faciliter l’accès à ces informations et appuyer le secteur privé dans la promotion de la transparence de ses activités, le World Ressources Institute (WRI) a conçu en collaboration avec des organismes gouvernementaux, des représentants de ce secteur, des organisations de la société civile, l’Open Timber Portal (OTP). Cette plateforme web indépendante interactive promeut le respect de la légalité dans la production et le commerce du bois en compilant des informations provenant de l’administration, du secteur privé et des observateurs indépendants sur la conformité du secteur forestier dans les pays producteurs. Actuellement, l’OTP héberge des informations sur les sociétés forestières des différents pays du Bassin du Congo. De façon volontaire, les communes et entreprises forestières y chargent leurs documents de légalité dans l’activité forestière selon les dispositions de l’annexe 7 de l’APV FLEGT. Ce qui permet aux potentiels acheteurs de bois et autres acteurs intéressés qui visitent le portail d’attester de la légalité et de la transparence des entreprises. Ainsi, celles-ci peuvent diriger leurs clients qui mènent leur diligence raisonnée dans le cadre de RBUE ; Lacey Act et autres mécanismes contraignants d’accès au marché de bois tropicaux vers le portail avec à la clé au moins deux avantages majeurs.

Testé et approuvé

Le premier repose sur la disponibilité et l’accès facile à une liste précise des documents de légalité issus des grilles de légalités APV FLEGT. Le second avantage consiste en la possibilité pour les clients de télécharger les documents directement sur la plateforme avec la garantie du contrôle qualité rigoureux de WRI en amont pour crédibiliser le fournisseur. Encore nouveau, le secteur privé camerounais gestionnaire des ventes de coupes et forêts communales a besoin d’un accompagnement pour l’appropriation effective de la plateforme ; la mise à jour de leur profil et la mise en ligne de leurs documents de légalité ; recueillir leurs commentaires éventuels sur l’outil afin de l’adapter continuellement aux besoins de la filière bois et l’arrimer aux exigences du marché ; s’assurer que la liste de documents sur l’OTP reste compatible avec la grille de légalité APV FLEGT pour les ventes de coupes et le forêts communales après les révisions en cours, etc. Ce sont quelques objectifs visés par l’atelier de sensibilisation et d’échange sur l’utilisation de la plateforme Open Timber Portal (OTP) par les communes et les entreprises forestières organisé du 22 au 24 janvier à Bertoua.

La rencontre présidée par la délégation régionale du ministère des Forêts et de la Faune (Minfof) de l’Est représenté par Enguen Stephen, rassemble une trentaine de participants venus de divers horizons du pays dont les responsables sont favorables à l’initiative. Le but est de leur donner des outils qui leur permettent d’améliorer leur score sur l’OTP et passer le cap de 50% contre moins de 20% pour certains voire zéro pour d’autres. Présent, Alexis Ngonché, des entreprises Dino et Fils, partenaire communal de Batouri utilise des superlatifs pour exprimer sa satisfaction de l’emploi de la plateforme dont les résultats séduisent. Au 31 décembre 2023, l’on note une transparence accrue dans le secteur forestier, indique Dr Fridolin Choula dans sa présentation des principales réalisations en matière de gouvernance forestière obtenues grâce aux travaux sur l’OTP. Soit de 302 documents d’entreprises à 651 dont 459 valides et 192 expirés. Par ailleurs, le nombre d’utilisateurs de la plateforme ne cesse de croître. Les Etats-Unis occupent la première place suivie du Gabon qui s’est lancé dans la certification (2e). Troisième dans le classement avec un nombre d’utilisateurs estimé à près de 3000, le Cameroun peut faire mieux. En Europe, ce nombre frôle le cap de 12000 contre plus de 5000 en Asie. C’est dire si même ce marché jadis propice aux exploitants clandestins veut s’arrimer à la légalité. 

Nadège Christelle BOWA

Réactions

Dr Fridolin Choula

Il y a au niveau de WRI, un contrôle rigoureux des documents publiés

Que gagne une commune à être présente que la plateforme OTP ?

Dans le monde entier, la forêt pose un dilemme. Faut-il l’exploiter ou pas ? Est-ce que la forêt est conservée ; est-elle gérée durablement ? Or les communes sont assez faibles pour mener un lobbying sur le plan international et dire ce qui est fait, ce qui peut être fait. Que ce soit pour la procédure carbone, le nouveau règlement de l’Union Européenne ou toutes autres initiatives concernant la forêt, la base est la légalité. Les grandes entreprises peuvent facilement se présenter à qui et quand elles veulent. Ce n’est pas le cas des petites entreprises et forêts communales qui ont besoin des initiatives comme celles-ci pour montrer sur la base de leurs documents de légalité -c’est vraiment le critère numéro 1- qu’elles sont légales et transparentes. Ce n’est qu’à ce prix qu’elles pourront attirer des partenaires qui viendront contribuer à la gestion durable et à la conservation de leur forêt.

Dans son propos, le représentant du Délégué régional du Minfof a mentionné le Sigif. Quelle différence ou complémentarité avec l’OTP ?

Le Sigif est le Système informatique de gestion de l’information forestière mis sur pied pour contrôler le flux du bois sur le plan national. Toutes les autorisations sont délivrées par le Sigif. Seulement, vous êtes au Sigif parce que vous êtes opérateur. Vous y avez accès à vos documents. Mais, vous ne pouvez pas par le Sigif communiquer avec un partenaire à travers le monde. Il y a des gens qui sont globalement intéressé par les communes et qui aimeraient savoir quelles sont celles qui travaillent de façon sérieuse. Ces partenaires ne peuvent pas entrer dans le Sigif parce qu’ils ne sont pas enregistrés. Open Timber Portal est une initiative qui permet de mettre sur le web, les documents de légalité, de montrer le sérieux des entreprises et des communes de sorte que même par hasard, le partenaire peut tomber sur vous, et voir que vous faites des efforts pour rester dans la légalité. Open Timber portal, c’est la forêt. On ne distingue pas les essences. Ça va de l’exploitation à l’exportation. Tout ce qui est document de légalité est présenté sur Open Timber portal avec cet avantage qu’il y a d’abord au niveau de WRI, un contrôle rigoureux des documents. En plus, la société civile commente ce processus, ce qui le rend davantage crédible.

Alexis Ngnoche

On conquiert des marchés impossibles par le passé

Je ne découvre pas l’Otp à cet atelier. Je l’utilise depuis. C’est une plateforme qui permet d’avoir une visibilité sur notre entreprise. Le monde étant devenu un village planétaire, si tu veux avoir des informations sur ma société, il suffit d’ouvrir Open Timber Portal. On gagne en temps dans les explications aux questions que de potentiels clients nous posent. Ce qui rend les échanges fluides. Notre présence sur cette plateforme nous permet de toucher des marchés qu’hier on ne pouvait pas conquérir. Certaines personnes nous découvrent sur cette plateforme et nous contactent.

Guy Youmbi, Foresterie communale de Bokito

Être plus regardant sur la veille légale réglementaire

La plateforme nous permet de suivre la légalité sur les questions d’exploitation forestière. On est passé du système Règlement Bois Union Européenne (RBUE) au système Règlement zéro déforestation (EUDR). Ce changement de paradigme nous amène en tant qu’exploitant forestier à être plus regardant, strict en ce qui concerne leur veille légale réglementaire (documentation liée à l’exploitation forestière) et la commercialisation du bois sur le marché Européen.

Minko Assoumou, commune d’Ambam

L’OTP augmente la visibilité de la commune

Depuis l’accord de partenariat volontaire FLEGT, il faut beaucoup de documents pour commercialiser le bois dans l’Union Européenne. La plateforme facilite cet échange. Si plusieurs partenaires qui vous demandent les mêmes documents, vous pouvez les orienter sur la plateforme pour les télécharger. L’OTP augmente la visibilité de la commune qui fait dans le bois et accroît le nombre de ses partenaires attirés par la légalité.

Réalisée par

Nadège Christelle BOWA

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